3 avril 2023

Il est nécessaire d’envisager des analogies avec des personnes ayant une déficience intellectuelle pour mieux répondre aux problématiques des personnes aînées autistes.

Si elle est aujourd’hui une condition neurodéveloppementale reconnue, il faut savoir que l’autisme est un « phénomène » relativement nouveau dans l’histoire du Québec. Le premier plan d’action en autisme remonte à 2003 ; année avant laquelle les diagnostics étaient rares et concernaient majoritairement les hommes. En raison d’un manque de connaissances sur le sujet, beaucoup de personnes recevaient un diagnostic de trouble de santé mentale ou, principalement, de déficience intellectuelle.

Depuis 2003, des trajectoires de soins ont été établies, des méthodes d’intervention privilégiées et des collaborations interministérielles, même timides, ont émergé. Mieux connu, l’autisme affiche désormais un taux de prévalence de 1/66 et se conjugue aussi au féminin avec, notamment, beaucoup de diagnostics tardifs à l’âge adulte.

Éviter les errances diagnostiques

Pour autant, et contrairement à la déficience intellectuelle, très peu de recherches ou d’études s’intéressent aux effets du vieillissement chez les personnes autistes au Québec, alors même que certains indicateurs clignotent… En , un rapport de l’INSPQ démontrait que le taux de mortalité chez les personnes autistes était trois fois plus élevé que dans la population en général. Un phénomène qui s’explique en grande partie par le manque de services offerts aux adultes.

Un autre phénomène aux impacts potentiellement majeurs pour la qualité de vie des aînés autistes : l’overshadowing ou le fait d’attribuer les symptômes ressentis d’une personne à sa condition plutôt qu’à leur cause réelle. Cette « errance » diagnostique peut alors retarder l’identification d’autres problèmes de santé et le référencement aux services appropriés. Identifié en déficience intellectuelle (DI), ce phénomène reste encore sous-estimé en autisme, mais pourrait expliquer, en partie, le taux de mortalité supérieur décrit plus haut.

Dans le même ordre d’idée, comment faire comprendre à une personne autiste qui peut rencontrer des défis de perception de la douleur, qu’elle développe la maladie de Parkinson ou un cancer ? Que fait-on pour diminuer la souffrance d’une personne non verbale qui n’arrive pas à exprimer un malaise ? Là encore, peu de spécialistes se sont penchés sur les besoins des personnes autistes qui développent des problèmes liés au vieillissement.

Un manque de ressources adaptées

Au-delà de cette problématique du vieillissement des personnes autistes vient celle de leurs proches aidants. Les adultes autistes vivent souvent en situation de dépendance face à leurs proches, en particulier en raison des délais d’attente infinis pour un milieu résidentiel substitut. Intervenant dans des conditions de rupture mal comprises ou de deuil, le déménagement est une source d’anxiété et de désorganisation, sans compter que les milieux résidentiels ne sont pas tous adaptés et que le personnel n’est pas adéquatement formé.

À l’heure actuelle, il n’existe d’ailleurs pas de véritables milieux d’hébergement spécialisé pour les adultes autistes âgés. Qu’ils soient publics ou privés, les établissements de santé et les ressources d’hébergement sont aujourd’hui confrontés à un défi de taille pour bien les accueillir : formation du personnel, référencement des bonnes pratiques, adaptation des protocoles d’intervention (langage simple, etc.).

À ce sujet, le rapport d’Adam[1] propose une approche multidisciplinaire dans les services offerts aux personnes aînées ayant une DI qui pourrait servir de base pour le champ de l’autisme. Il est ainsi souhaité qu’il y ait un échange d’expertise entre les différents intervenants de la santé. De même, il est préconisé que les professionnels en DI, connaissant bien le patient, travaillent conjointement avec le personnel de la santé et les autres professionnels impliqués.

Pour aller plus loin, une étude de l’université de Nouvelle-Galles du Sud[2], en Australie, préconisait dès 2014 de planifier cette étape du vieillissement avec une DI selon huit domaines cruciaux : développement personnel, autodétermination, relations interpersonnelles, inclusion sociale, droits de la personne, bien-être émotionnel, physique et matériel. Un joli programme, repris en partie par la nouvelle loi sur le Curateur public au Québec, qui insiste beaucoup sur l’autonomie et les préférences de la personne. Une façon de rappeler l’importance de la prise en compte de la parole des personnes les plus vulnérables, et notamment celles des aînés autistes.

Par la Fédération québécoise de l’autisme

[1] The palliative care needs of adults with intellectual disabilities and their access to palliative care services: A systematic review. Palliative medicine: The Research Journal of the EAPC – A Multiprofessional Journal, 34 (8), 1106-1018)

[2] University of New South Wales, 2014. Successful Ageing for People with Intellectual Disability

Vous avez aimé cet article? Partagez-le!
0

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *