Le balado : un médium riche… encore méconnu des aînés !

Les aînés adorent les contenus audios. Pour preuve, ils ont passé en moyenne plus de 17 heures par semaine à écouter la radio traditionnelle AM-FM au printemps 2021 (1). Paradoxalement, peu d’entre eux font le saut vers la baladodiffusion, qui est LA nouvelle manière de consommer des contenus audios. En effet, seulement 7 % des Canadiens francophones âgés de 65 ans et plus écoutent des balados ou des podcasts (terme anglophone) (2).

Introduction à un médium qui a pourtant tout pour leur plaire

Claire Blouin, 76 ans, est la première à le reconnaître. La radio demeure aujourd’hui le médium de référence de sa génération. Pourtant, ça n’a pas empêché cette secrétaire à la retraite — passionnée de culture — d’adopter la baladodiffusion dès son apparition au milieu des années 2000.

« À l’époque, je devais télécharger sur Internet les fichiers MP3 et les transférer sur mon petit lecteur numérique iPod », se rappelle-t-elle. Le mot « podcast » vient d’ailleurs de la contraction de « iPod » et de « broadcasting », signifiant diffusion. « J’avais pris l’habitude d’écouter deux émissions culturelles françaises que j’aime beaucoup : Le masque et la plume ainsi que Les Chemins de la philosophie, produit par France Inter. »

Claire Blouin écoute aujourd’hui ses émissions préférées sur sa tablette. Aussi, depuis qu’un large pan de la programmation radiophonique québécoise est disponible en baladodiffusion, elle a aussi pris l’habitude d’écouter des segments d’émission en rattrapage.

C’est toute la beauté du podcast : d’une part, on peut télécharger des émissions radiophoniques de partout dans le monde et découvrir des contenus de haute qualité comme This American Life aux États-Unis, qui ont connu un succès international grâce à la baladodiffusion. D’autre part, on peut écouter nos émissions où et quand bon nous semble. « J’ai plusieurs amis qui ont pris l’habitude de faire de longues marches en écoutant leurs balados préférés sur leur téléphone », illustre la dame retraitée.

Surmonter l’obstacle technologique

À l’heure actuelle, l’aspect technologique du podcast semble freiner son adoption chez les aînés. Le balado est un fichier numérique que l’on écoute sur un ordinateur, une tablette ou un téléphone intelligent avec une application de lecture (ex. : Spotify, iTunes, Google Play, YouTube).

Or, les aînés n’ont pas encore développé le réflexe d’écouter des contenus audios « en ligne ». Dans le cas de la radio AM-FM, uniquement 5 % des auditeurs âgés de 65 ans et plus ont recours à une plateforme numérique Web ou mobile pour écouter leurs émissions (2).

En consultant le rapport de l’Observateur des technologies médias paru en janvier 2022, on constate que les habitudes d’écoute de baladodiffusion varient avec l’âge. Si les auditeurs de tous les âges confondus préfèrent le téléphone intelligent à 80 %, l’ordinateur à 30 % et la tablette à 17 %, le groupe des 50 ans et plus boude carrément l’ordinateur au profit du téléphone à 71 % et la tablette à 32 %.

Geneviève Thibodeau, directrice numérique au Groupe Maurice, croit qu’il ne faut pas s’arrêter à ce prétendu « obstacle technologique ». « Il y a un stigma comme quoi les aînés et la technologie n’iraient pas ensemble, alors que c’est faux. Il suffit de rendre les plateformes et les contenus accessibles. » La directrice numérique cite l’exemple de l’application mobile Théia déployée au sein du Groupe Maurice — pour suivre la programmation des activités en résidence — qui est largement utilisée par les résidents. C’est dans l’objectif de « lutter contre l’âgisme » que le Groupe Maurice a créé le balado Dans quelques aînés, abordant des sujets tels que l’urbanisme, l’argent, l’hébergement et le développement durable. « Notre objectif était de donner la parole aux aînés sur des enjeux de société qui les touchent », explique Geneviève Thibodeau.

Des contenus riches et variés

La baladodiffusion gagne en popularité chaque année puisque 22 % des Canadiens francophones et plus de 25 % des 35-65 ans l’ont aujourd’hui adoptée ; ce qui a pour effet de faire exploser l’offre de contenu.

D’une part, les grands diffuseurs québécois ont commencé à garnir leur catalogue de balados. Québecor a créé QUB radio en 2018, une application sur laquelle on trouve de nombreuses émissions d’actualité, dont celles de Richard Martineau et de Benoit Dutrizac.

En 2019, Radio-Canada a lancé la plateforme OHdio, qui regroupe les chaînes ICI Radio-Canada Première et ICI Musique, ainsi que des balados originaux. « Nous offrons plusieurs émissions susceptibles d’intéresser les baby-boomers, fait valoir Emilie Brazeau-Béliveau, premier chef en communication et marketing de la radio. Par exemple, des contenus mettant de l’avant de grands événements qui ont touché cette génération, comme Pour l’avoir vécu avec Anne-Marie Dussault et Marc Laurendeau, ou des balados sur des enjeux liés à la santé ou sur des réflexions comme Être avec Alain Crevier, ou Dis-moi docteur animé par le docteur René Wittmer. »

Il existe aussi, depuis les débuts de la baladodiffusion, un fort mouvement de créateurs indépendants qui autoproduisent leurs balados et les distribuent directement sur les plateformes d’écoute.

Des balados québécois à découvrir : 

• Le temps de vivre et Y’a pas d’âge, deux séries de balados lancées par la Fédération des aînés franco-manitobains
• Accolades, un balado donnant la parole à six résidents des Jardins du Patrimoine de Val-d’Or. Gisèle, raconte comment ils ont vécu la première vague de la pandémie
• 3.7 planètes de François Bellefeuille, un balado humoristique sur le thème de l’environnement
• L’ombre du doute, un balado d’investigation de Stéphane Berthomet, produit par OHDio

Sources statistiques

(1) Données du CRTC

(2) Rapport de l’Observateur des technologies médias, janvier 2022, Analyse du marché